http://www.assemblee-nationale.fr/12/pdf/propositions/pion2736.pdfEnregistré à la présidence de l'Assemblée Nationale le 8 décembre 2005.
EXPOSÉ DES MOTIFS
MESDAMES, MESSIEURS,
La séparation et le divorce sont des moments de rupture pénibles et difficiles à gérer pour
les parents comme pour les enfants. Ce type dépreuve sinscrit dans le quotidien de millions
de familles en France. On comptait en 2003, 125 175 divorces pour 275 963 mariages. Près
dun mariage sur deux se termine par un divorce à Paris, ce rapport est de un sur trois dans le
reste de la France.
Derrière ces chiffres se cachent des situations extrêmes liées aux difficultés rencontrées
par les parents à préserver les enfants du conflit conjugal. Or, la séparation des parents est
dautant plus douloureuse et traumatisante pour un enfant quelle est conflictuelle. Quand le
conflit porte sur la garde de lenfant, ce dernier fait lobjet dun combat juridique acharné
particulièrement néfaste à son équilibre. Instrumentalisé dans cette « guerre de la rupture »,
lenfant est exposé au chantage psychologique dun parent qui abuse de son autorité parentale
en ne respectant pas le droit de visite et en lincitant à rompre tout lien affectif avec son autre
parent.
Le prix de cette maltraitance psychologique dont lenfant fait lobjet nest pas sans
conséquence sur la construction de sa personnalité. Repli sur soi, perte de confiance en soi,
perception biaisée de la réalité sont autant de symptômes qui annoncent ou accompagnent de
graves perturbations : troubles psychosomatiques, échec scolaire mais également
comportements dangereux (alcool, drogue) qui peuvent mener lenfant jusquau suicide.
Le parent associant abusivement son enfant à son divorce, non seulement ne respecte pas
léquilibre psychologique de lenfant mais également ne respecte pas la loi.
En effet, au terme de article 373-2 du code civil, « chacun des père et mère doit maintenir
des relations personnelles avec lenfant et respecter les liens de celui-ci avec lautre parent. »
Le juge doit par ailleurs veiller à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs et
prendre les mesures qui simposent afin de garantir la continuité et leffectivité du maintien
des liens de lenfant avec chacun des parents. La loi du 4 mars 2002 a, dautre part, confirmé
le recours à la médiation familiale : en cas de désaccord entre les parents, la recherche dun
exercice consensuel de lautorité parentale est favorisée. Elle a aussi donné la possibilité au
juge dordonner linscription sur le passeport des parents de linterdiction de sortie de lenfant
du territoire français, sans lautorisation des deux parents.
Si ces mesures ont constitué de vraies avancées juridiques au bénéfice des enfants, elles
ne prévoient malheureusement pas la prévention des conflits familiaux, comme cela existe
déjà au Canada.
Dès lors, il nous semble nécessaire de renforcer les dispositifs de soutien et
daccompagnement à destination des parents en incluant dans le code civil la possibilité pour
le juge de proposer aux parents en instance de séparation un stage de guidance parentale.
Lobjectif de ce stage serait pour chacun des deux parents de mesurer limpact de leurs
comportements, de leurs actes ou de leurs paroles, sur leurs enfants et daccroître leur
information.
Il prendrait la forme dun accompagnement dans la durée des parents traversant de
grandes difficultés lors de la séparation afin quils puissent identifier et résoudre par euxmêmes
les causes du conflit parental. Le stage de guidance parentale devra être administré par
une équipe pluridisciplinaire qui interviendra dans les domaines :
juridique, en expliquant la loi, les droits et les responsabilités des parents ;
psychologique, en expliquant les effets des conflits parentaux sur les enfants ainsi que
les difficultés inhérentes à la gestion dune rupture ;
médical, en soutenant les personnes atteintes déventuelles pathologies ;
social, pour trouver des solutions aux contraintes du quotidien et organiser la vie des
parents autour de lenfant.
Il reviendrait au juge dordonner ce stage lors de la demande de séparation ou à
nimporte quel moment de la procédure de séparation.
Tels sont les motifs pour lesquels il vous est demandé de bien vouloir adopter les
dispositions qui suivent.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
Larticle 252 du code civil est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Le juge peut accompagner la tentative de conciliation de lobligation daccomplir pour
les deux parents un stage de guidance parentale, selon des modalités fixées par décret. Ce
stage peut être imposé tout au long de la procédure de divorce. »
Article 2
Le dernier alinéa de larticle 373-2-6 du code civil est complété par une phrase ainsi
rédigée :
« Dans le cas dune séparation conflictuelle, il peut aussi enjoindre les deux parents de
suivre un stage de guidance parentale prévu à larticle 252. »
Par ailleurs Jean-LouisTouchot propose un chantier Wiki sur le thème de la guidance parentale à
http://www.p-a-p-a.org/html//modules/wiwimod/index.php?page=La+guidance+parentaleSur le site belge très complet
http://www.p-a-p-a.org/html//modules/wiwimod/index.php?page=La+guidance+parentaleon trouve la définition suivante de la guidance parentale :
« 2) GUIDANCE PARENTALE SOUS MANDAT JUDICIAIRE
Dans cette formule, un intervenant psy sera désigné par le juge qui aura pour mission daccompagner activement les parents dans la recherche de moyens qui visent à rétablir les meilleurs liens possibles entre les enfants et chacun de leurs parents.
Si les liens avec un parent ont été distendus ou suspendus, un processus de retissage des liens progressif sera envisagé.
Dans ce processus, chaque parent accepte dêtre impliqué, ensemble ou individuellement : autant le parent éloigné que le parent proche. Les enfants seront également entendus, mais sans faire reposer sur leurs épaules la résolution des conflits entre les parents.
Le moment venu, le psy interviendra activement dans le retissage des liens perdus entre le parent éloigné et les enfants.
Le processus doit être « soutenu », et doit éviter les possibilités de manuvres dilatoires. Mais il doit aussi laisser le temps nécessaire pour que les attitudes, les liens et les préjugés évoluent.
Dans ma pratique, je fais des évaluations régulières chaque fois quun consensus partiel a été obtenu ou chaque fois que des modalités dhébergement ou de reprise de contacts ont été effectuées. Jenvoie ces évaluations par mail à chaque partie et à leurs conseils qui peuvent à chaque fois faire des commentaires qui sont immédiatement envoyés à lautre partie.
Lintervenant doit bénéficier dune large marge de manuvre dans les initiatives à prendre : entretiens individuels, avec les deux parents, un parent avec un enfant
selon le contexte et les besoins, mais toujours dans la transparence.
Les parents doivent savoir dès le départ que si la situation névolue pas, lintervenant prendra linitiative de faire un rapport au juge sur létat de la situation.
Ainsi, dans les cas dALIÉNATION PARENTALE moyenne ou sévère, lintervenant pourra dans les meilleurs délais faire part au juge des réactions de sabotage du processus, de non respect des engagements pris, ou de dénigrement ou de manipulation ou de mauvaise foi quil aura pu lui-même CONSTATER DANS LE COURS MÊME du processus de guidance, et non plus postulé au départ (ce qui est toujours violemment dénié par la personne concernée).
Tout en faisant comprendre aux parents quon développe un processus où le maximum possible dautonomie leur est laissé, ils doivent en même temps savoir quen cas de non collaboration au processus, il y AURA rapport au juge et sanction à la clé.
Le juge doit pouvoir exercer son autorité pour imposer le respect du processus.
Dans beaucoup de ces situations, la médiation familiale est à exclure car elle donne au meilleur manipulateur un « outil » de plus pour augmenter son emprise en lui faisant gagner du temps.
Dans ce processus, la collaboration active des AVOCATS est indispensable.
Dune part, ils sont tenus au courant au fur et à mesure de lévolution de la situation, dautre part ils doivent sengager à abandonner la logique de confrontation systématique, et donner toutes ses chances à la recherche dune véritable COLLABORATION PARENTALE respectueuse de chacun, des enfants en premier.
Le juge doit pouvoir être tenu régulièrement au courant de lévolution du processus de guidance et prendre le cas échéant les mesures qui simposent.
Il sagit donc dun processus encadré et contrôlé par la Justice. Lintervenant psy et les avocats sont des auxiliaires actifs et collaborant dans le processus. Celui-ci est rapide dans son démarrage et son déroulement, mais laisse le champ libre à une évolution en profondeur des relations et des positions de chacun. »
Ensuite Touchot débat de la surveillance des guideurs, indispensable.